Le cerveau
Neuroscience affective et sociale
Neuroscience affective et sociale, synthèse de la conférence du docteur Catherine Gueguen, lien en fin d’article et complément.
Il y a les neuroscience cognitive, elles s’occupent de tout ce qui est intellectuel, la mémoire, l’apprentissage, la  pensée.
Les recherches sur les neurosciences affectives qui ont débuté il y a 15 ans, elles s’occupent des émotions, réaction biologique instantanée du corps qui régit, comme les rougeurs, angoisses, des sentiments ressentis, ces sensations qui durent dans le temps et des capacités relationnels.
L’enfant est en construction pendant longtemps et son cerveau est plus vulnérable qu’on ne le pense, il est malléable et immature.
Les nouvelles recherches nous montrent qu’une grande partie de notre cerveau est attribuée aux relations sociales, pour l’humain ces relations sont capitales sur tous les plans du développement et de l’être dans sa globalité.
Le cerveau de l’adulte est également modifiable on parle de plasticité. Mais le cerveau de l’enfant reste le plus malléable par rapport à l’adulte. Tout ce que l’enfant vit, y compris pendant la période intra-utérine, toute cette somme d’expériences modifie le cerveau, sur ces fonctions cognitives donc l’apprentissage, la mémoire, la réflexion, l’affectif. L’environnement social et affectif influence la sécrétion des molécules cérébrales, le développement des neurones, la myélinisation « la substance blanche qui entoure l’axe des neurones », il influence les connexions entre les neurones, les circuits neuronaux, modifie l’expression de certains gènes.
L’enfance construit l’être humain de demain.
Les émotions sont capitales pour le développement de l’être humain, elles sont des signaux de ce que nous sommes et nous renseignent sur nos souhaits et nos besoins profonds, c’est la conscience de soi.
Lorsqu’un enfant pleure il n’y peut rien, c’est juste une émotion à accueillir et qui bien souvent le déborde. Les adultes ne connaissent plus l’éventail des émotions possibles car dans leur enfance, l’éducation leur a appris ou donné l’injonction de les  taire. L’enfant se déconnecte peu à peu de ses émotions lorsqu’il a eu l’interdiction de les verbaliser, donc enfant ou adulte il ne sait plus y accéder. L’adulte généralement ne sait ou ne peut entendre les larmes des enfants donc sous la demande parental ils apprennent à les taire. Verbaliser ces émotions est capital car elles sont connectées à nos besoins les plus profonds. Une émotion traduit un besoin vital qui n’est pas nourri.
L’expression des émotions aide à apaiser notre cerveau émotionnel, l’amygdale cérébrale sécrète les molécules de stress, verbaliser permet de réguler son stress. La connexion avec nos émotions est un pilier pour se connaitre et trouver ce qui nous correspond dans la vie.
Adulte avec la colère ou la peur il est possible de se contrôler si le cortex préfrontal fonctionne normalement, il nous permet de prendre des décisions.
Être capable de nommer ce que nous ressentons calme notre amygdale cérébrale qui est le centre de la peur et la réévaluation de la situation modifie le circuit émotionnel. Chez l’enfant les choses se passent autrement car son cerveau est immature, il est fragile et malléable, son développement est génétique, environnemental. L’environnement modifie nos gènes d’où un impact sur le cerveau donc le comportement.
Le cortex orbitaux frontal, c’est lui qui régule nos comportements sociaux, il nous permet d’être totalement humains.
L’environnement pour le bon développement d’un enfant devrait être empathique, aimant et soutenant dans ce cas là le cerveau se développe formidablement bien, les recherches nous montrent qu’un enfant élevé avec empathie va devenir empathique. L’empathie c’est savoir écouter l’autre, être un espace d’accueil pour sa parole sans être jugé, interrompu, une écoute respectueuse dans l’intelligence du cœur. Cela engendre l’auto empathie qui permet de se jauger dans une situation donnée sans se juger.
Le cerveau archaïque que nous avons en commun avec les reptiles nous permet de réagir face au danger ;
le cerveau émotionnel nous le partageons avec les mammifères, il nous est utile dans les relations aux autres et à nous même ; régule les instincts primitifs du cerveau archaïque.
Le cerveau supérieur néocortex siège de la logique, du raisonnement. soit 85 % du volume cérébral total la conscience, le langage, sensoriel, l’apprentissage… On y distingue le lobe préfrontal qui nous permet d’être créatif, réfléchir, résoudre les problèmes, conscience de soi, empathie …
L’apprentissage, la mémoire sont également très impactés par les émotions, apprendre dans la joie stimule notre mémoire. La peur, les pleurs sont des systèmes de défenses à court terme donc la mémoire se joue sur la même durée.
L’enfant petit ne peut pas contrôler ses émotions, car ses structures cérébrales ne sont pas encore matures donc ce n’est pas qu’ils ne veulent pas, mais c’est qu’ils ne peuvent pas faire autrement.
Ils ne peuvent pas prendre de recul, c’est impossible.
A partir de 5, 6 ans les choses s’améliorent, avant c’est le développement du cerveau archaïque et émotionnel, après il commence un peu mieux à gérer et comprendre les émotions. L’enfant ne peut pas connaitre les tenants et les aboutissants ses colères, il est purement et simplement emporté par la vague. L’enfant petit prend les émotions de plein fouet, sans filtre mais il n’a pas la possibilité de s’apaiser seul, si on le laisse il va sécréter du stress et le développement de son cerveau va être altéré ou retardé, il mettra également plus de temps à récupérer. Pour cinq minutes de colère, il faut cinq heures au corps pour retrouver son équilibre optimal. Les molécules de stress sont nocives pour un cerveau en développement. L’enfant a besoin d’être sécurisé, consolé lorsqu’il a des émotions désagréables. C’est l’entourage qui a un impact sur le développement global, sur le développement du cerveau de l’enfant, il a besoin d’empathie, de sentir, voir et comprendre les émotions de l’autre. Comprendre, aider à formuler et savoir apaiser fait partie des règles d’or que chaque parent ou encadrant devrait mettre en place. Empathie cognitive permet de comprendre les intentions d’autrui et empathie affective permet de comprendre leurs émotions, dire les émotions et les aider à s’apaiser.
Les menaces, les cris et les punitions n’ont rien d’éducatifs et de nourrissant, au moins 88%,  selon les statistiques de l’OMS, de personnes sont maltraitées sur la planète.
En France, 2 enfants par jours meurent de maltraitance, les pleurs sont la première cause de maltraitance chez l’enfant.
Il ne s’agit pas de céder, mais d’apaiser et de faire attention à notre façon de dire non et de s’imposer. En apaisant un enfant qui pleure, on participe à la maturation du cerveau de l’enfant. C’est l’attitude de l’adulte qui va faire que l’enfant va aller bien, une attitude douce, chaleureuse, le ton de la voix adapté, le regard bienveillant. L’enfant ne peut pas comprendre les gros yeux. Il n’est pas naturel pour un cerveau de comprendre la négation, ne fait pas si, ne fais pas ça est compliqué à comprendre et intégrer alors qu’une phrase sans négation est plus facile à comprendre, même si le message est le même.
Ne met pas les doigts dans ton nez
ou si tu as vraiment besoin de mettre tes doigts dans ton nez maintenant va dans la salle de bain, il y a des mouchoirs et un miroir.
L’impact énergétique et émotionnel, éducatif de ces phrases ne sont pas les mêmes. La valeur positif et éducative sont au service de l’enfant et de la relation, même si je vous l’accorde la majorité des échanges parentaux se font sur un mode de communication plus expéditifs, changer son mode de fonctionnement est difficile, mais pas impossible. Cependant votre enfant ainsi éduqué, éduquera ses enfants dans le même respect de la relation. Vous aurez fait un effort, mais aurez la satisfaction d’avoir contribué pour le bien être et le respect des générations futures.
Si on aide l’enfant dans ces tempêtes affectives, les choses ne dureront pas, c’est l’adulte qui fait que l’enfant ira bien. La poussée neuronale développe les circuits et développe cette zone du cerveau, un enfant qui a une bonne conscience morale dès le début de sa scolarité a été bien accompagné entouré, entendu et compris.
Le cerveau est une des choses les plus complexes, sa maturité se termine environ vers 21, 27 ans mais il reste plastique.
Un des fondateurs de la neuroscience affective et sociale est Allan Shore, « le  cortex orbitaux frontal est une structure précieuse pour réguler ses émotions, pour aimer, pour l’empathie, le sens moral et éthique, prendre des décisions, c’est l’environnement de la petite enfance qui va permettre à ce cortex et aux autres de bien se développer. Selon lui, tous les dysfonctionnement sociaux sont dans cette zone. »
Giacomo Rizzolatti professeur de physiologie humaine, dirige le département de neurosciences de l’Université de Parme. « Les neurones miroirs sont un facteur important dans le développement de l’enfant car il imite les gestes de l’autre pour apprendre et s’intégrer. Si on observe quelqu’un bouger, notre cerveau et les neurones miroirs activent les mêmes zones alors que notre corps ne bouge pas. Le cerveau apprend de ce qu’il voit. Les neurones miroirs rendent les émotions contagieuses, nous vivons les émotions de l’autre. »
L’amygdale cérébrale est mature dès la naissance, c’est elle qui développe les molécules de stress chez l’enfant, cette amygdale est capable de stocker inconsciemment toutes les expériences de l’enfance. Faire peur à un enfant, même pour jouer a des conséquences, le peur et le stress sont néfastes car les structures qui permettent de gérer cela ne sont pas présentent dans le cerveau de l’enfant, il n’est pas capable de comprendre.
L’hippocampe a une place centrale dans l’apprentissage et la mémoire. Dans la mémoire émotionnelle consciente et à long terme, elle est active dans la petite enfance, comme on apprend en permanence, l’hippocampe évoluera toute notre vie. Il fabrique tout le temps des neurones. Mais le stress détruit des neurones donc la mémoire et l’apprentissage qui sont liés, sont bloqués. Plus possible d’apprendre suite à un  stress nocif pour l’hippocampe.
Un chercheur de Montréal Michael MEANEY université McGill Canada, a fait des recherches sur le maternage qui permet la réduction du stress, donc de se sentir sécurisé. « Prendre soin stimule le système biologique et émotionnel, consoler stimule l’action du système nerveux et aide la concentration, développe le fonctionnement de l’hippocampe impliqué dans la mémoire et l’apprentissage. Le maternage augmente des molécules positives pour le développement. »
En 2012, une étude réalisée par Joan Luby, professeur de psychiatrie à l’université de Saint-Louis, montre que lorsqu’un parent soutient, encourage son enfant quand il est petit, son hippocampe augmente de volume.
En 2014, Martin Teicher, chercheur à Harvard, étudie les conséquences de la maltraitance dans l’enfance, dont la maltraitance émotionnelle sur le cortex cérébral et les réseaux neuronaux. « Un grand nombre de circuits cérébraux particulièrement importants sont altérés, ce qui peut conduire à de nombreuses pathologies comportementales et psychiatriques : agressivité, anxiété, dépression, troubles dissociatifs (dépersonnalisation, troubles de l’identité), somatisations (manifestations corporelles d’un conflit psychique La privation affective ou la maltraitante entraine des difficultés de concentration, de l’anxiété, agressivité, trouble du comportement, conduites antisociales à l’âge adulte suicide et dépendance aux drogues. »
Des maltraitances même verbales entrainent le dysfonctionnement des circuits neuronaux et à la zone permettant la compréhension du langage. On se plaint des enfants qui ne comprennent pas le langage et qui parlent mal, mais qu’ont-ils- vécus ?
En 2009, Akemi Tomoda, chercheur à Harvard, étudie en IRM le cerveau de jeunes adultes qui ont subi durant leur enfance des « corrections » avec des ceintures, lanières ou autres objets. « Ils ont reçu ces sanctions en moyenne douze fois par an pendant trois ans, dans le but de les « éduquer ». Nous constatons que leur cerveau présente une réduction du volume de la substance grise dans la région préfrontale. La zone atteinte est la région la plus antérieure du cortex préfrontal, zone essentielle pour la vie sociale car impliquée dans la connaissance de soi, la capacité de sentir et de comprendre les autres, de réfléchir sur nos actes. Elle joue également un rôle dans l’attention et la mémoire de travail. »
En 2010 Jimmy heutson de l’université du Wisconsin a montré qu’un enfant ayant reçu des punitions corporelles observe que le développement du cortex orbitaux frontal avait diminué de volume, donc cela affecte le fait d’avoir un sens moral, de l’empathie.
Des chercheurs de l’université de Harvard se sont penchés sur les conséquences des paroles humiliantes. En 2009, Jeewook Choi montre que les paroles blessantes, humiliantes ou méprisantes ont des répercussions néfastes sur le cerveau des enfants et altèrent le fonctionnement de circuits neuronaux et de zones participant à la compréhension du langage. Ces atteintes sont à l’origine de somatisations, de dépressions, de troubles anxieux et dissociatifs (troubles de l’identité, dépersonnalisation). D’autres études encore montrent que ces paroles blessantes ont des effets potentiellement aussi graves que la maltraitance physique, et sont associés à des risques de délinquance et d’agressivité importants. Les enfants qui les subissent peuvent développer des troubles de la personnalité : personnalité borderline, narcissique, compulsive et paranoïaque.
En 2010, Jaimie Hanson, de l’université du Wisconsin, étudie en IRM le cerveau d’enfants ayant subi diverses punitions corporelles. « Leur cortex orbito-frontal présente une diminution de son volume. Or cette région joue un rôle primordial dans nos capacités d’affection, d’empathie et dans notre sens moral et participe à la régulation de nos émotions, ce qui explique les difficultés rencontrées par ces enfants dans leur vie relationnelle. »
« Pourquoi appelle-t-on agression le fait de frapper un adulte,
Cruauté le fait de frapper un animal
et éducation le fait de frapper un enfant. » Catherine Gueguen Pédiatre
Shalev 2013 « Les télomères des chromosomes nous protègent du vieillissement et de la mort des cellules, le stress de l’enfant rétrécit les télomères chez l’enfant d’où une espérance de vie plus courte. »
Le télomère est la région d’ADN du chromosome qui se situe à son extrémité. Le télomère permet de boucher les extrémités des chromosomes et de ne pas disperser le patrimoine génétique qu’ils contiennent.
Michael Meaney, scientifique et chercheur au Québec « nous avons démontré que des mères stressées sont distraites, insensibles à leurs enfants et sont souvent assez dure à leur égard. De plus cet effet peut se transmettre aux prochaines générations, faire en sorte que nos mamans soient heureuses devrait être une priorité ».
Antonio Damasio est une des premières personnes à avoir parlé des émotions et du circuit cérébral émotionnel du cerveau, il a écrit l’erreur de Descartes en 1995,
Il est neurologue et a observé que ses patients suite à un accident au niveau du cerveau n’étaient plus capables de choisir des choses capitales en lien avec leurs émotions, même si leur intelligence était normale.
Article tiré de la conférence
Document récapitulatif de cette conférence faite par le docteur Catherine Guegen